Out.
«
Elle m’aime, un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout. Un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout. Un peu ... Beaucoup, passionnément ... A la folie ... Pas du tout ! Un peu ... Beaucoup ... Passionnément ... A la folie ... Pas du tout ... ». Et merde. Encore foiré. Même ces enfantillages ont raison. Une saloperie de marguerite pour me rappeler que ... Et bien, que « pas du tout » ! Ils en croisent souvent ici, des abrutis qui épluchent les fleurs ? Des abrutis si vieux ? Des abrutis si ... Abrutis. A la réflexion, c’est assez poétique, de demander des sentiments à une fleur parce qu’un cœur n’est pas foutu de le cracher. J’irais l’hurler volontiers, que j’aime, si on me le demandait. Mais, allez savoir pourquoi, c’est le genre de chose qu’on cache de nos jours. Né à la bonne époque, j’aurais écrit une déclaration enflammée, affreusement romantique, et elle m’aurait épousé les larmes aux yeux ! Je lui aurais lu les plus grands poèmes, des plus grands poètes ! MAIS NON. Je suis né aujourd’hui, ici, et le romantisme, l’amour, la passion, la tendresse, ... Toutes ces choses là sont out. Démodées. Résultat, je me retrouve à demander à une foutue marguerite si oui ou non, tu m’aimes. Toi, là. Ouais, ouais. Je sais que tu sais que je sais que tu sais. Tout comment tu sais que je sais. Que tu ne m’aimes pas le moins du monde. C’est ridicule !
Pitoyable ! Regardez tous, hé oh ! Regardez dans quel état lamentable m’a mis une pincée de sentiments ! Sous tous les angles ! Voyons, arrêtez vous quelques instants, n’accélérez pas. Je suis là pour vous, autant en profiter. C’est rare que les inconnus se plantent sur un trottoir pour parler. Pourquoi n’en faites vous pas autant ? Jetez cette montre aux ordures. Le temps passe, bien sûr, la vie s’écoule. Trouvez vous plus bénéfique de courir là plutôt que de s’arrêter et ... D’échanger un petit bout de vie ? J’adore parler. Surtout avec ceux que je ne connais pas. J’ignore votre prénom, vous ignorez le mien. Tout ce que je connais de vous, c’est votre visage, votre démarche et vos vêtements. Ca s’arrête là. Pour l’instant.
Mais peut être, peut être accepteriez vous de vous asseoir sur ce banc, discuter. Ainsi je connaîtrai votre voix. Et.
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Paradose.